On avait parqué un éléphant venant de l’inde dans une étable obscure. La population curieuse de connaître un tel animal se précipita dans l’étable. Comme on n’y voyait guère à cause du manque de lumière, les gens se mirent à toucher cet animal. L’un d’eux toucha la trompe et dit :
- cet animal ressemble à un énorme tuyau !
Un autre toucha les oreilles :
- On dirait plutôt un grand éventail !
Un autre, qui touchait les pattes, dit :
- Non ! Ce qu’on appelle un éléphant est bel et bien une espèce de colonne !
Et ainsi, chacun d’eux se mit à le décrire à sa manière. Il est bien dommage qu’ils n’aient eu une bougie pour se mettre d’accord. (Contes soufis – Le Mesnevi - Rumi)
Ce conte de Rumi est riche d’enseignements :
Premier enseignement : ne pas se fier aveuglément à sa propre perception dominante: visuelle (la vue), auditive (son), olfactive (odorat), kinesthésique (toucher, sensation interne). Nous avons chacun de nous un sens plus développé qu’un autre, par exemple, certaines personnes sont plus auditives que d’autres ou plus visuelles, mais nous utilisons plus ou moins nos cinq sens qui sont nécessaires pour nous mettre en relation avec le monde extérieur. Ils nous permettent de voir, d’entendre et de comprendre une partie de la réalité, mais pas toute la réalité extérieure, car cela implique d’étendre sa vision au-delà des apparences. Et pour cela il est nécessaire d’une part d’aiguiser ses cinq sens et d’autre part, de développer son sixième sens qui est l’intuition. En effet, L’intuition permet de passer au-delà des apparences, et percevoir des réalités qui sont en règle générale filtrées par ses propres représentations, d’où l’intérêt de développer une vision globale.
Deuxième enseignement : ne pas porter de jugements ni d’interprétations hâtifs sans connaître les faits dans leur globalité, et rester le plus objectif possible ! Car étant limités par nos sens on ne peut prétendre détenir « La Vérité ». Car se croire détendeur de « La Vérité » c’est se croire Le Tout Puissant ! Il n’y a pas qu’une vérité, mais plusieurs vérités, et s’arroger « La Vérité » c’est contre-productive, illusoire et cela ne peut qu’alimenter son « Moi narcissique ».
Troisième enseignement : se rappeler que l’on est limité et faillible, mais toujours apte à progresser pour soulever les voiles qui nous empêchent de voir la réalité du monde. Nous avons besoin de lumière qui représente la connaissance (la bougie) pour éclairer nos zones d’ombres, afin d’élargir nos perceptions pour apercevoir les réalités extérieures, et sortir de l’ignorance.
Quatrième enseignement : se connaître, c’est connaître l’autre, et nous avons besoin de l’autre pour se connaître. ! En effet, plus nous faisons un travail sur soi, et plus nous pouvons aider l’autre dans sa construction, car, ce travail de connaissance à un double impact sur soi, et sur l’autre. Il agit interactivement, comme un miroir ! Grâce à un travail d’introspection, réflexion, méditation, nous devenons conscients de ce que nous sommes, et de nos limites, qui doivent être identifiées pour ne pas sombrer dans des projections sans fin !
Toutefois, il est clair que l’on ne peut prétendre se connaître parfaitement et encore moins connaître les autres dans leur totalité, c’est impossible ! Mais comprendre que nous sommes un tout, c'est-à-dire que nous avons des valeurs, des croyances, des histoires, des identités, des environnements, etc.… , qui doivent être respectés inconditionnellement ! Et dire d’une personne qu’elle est « ça » ou « ceci, » c’est complètement immature, et erroné, et souvent le reflet de nos propres projections, car ce que l’on perçoit des autres et souvent nos propres zones d’ombres que l’on peut identifier comme telles pour avancer, étant donné que l’homme est le miroir de l’homme !
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